Elections législatives : le militantisme politique a-t-il sa place dans l’entreprise ?

 

| Droit social |

 

Par Guillaume Roland et Sandrine Henrion, le 21 juin 2024

 

L’engagement politique d’un salarié, c’est un terrain miné pour l’entreprise !

Les salariés sont libres d’exprimer leurs opinions dans l’entreprise pendant leur temps du travail et l’employeur ne peut y apporter de restrictions que celles-ci sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir et sont proportionnées au but recherché (Article L1121-1 du Code du travail).

Ainsi, le salarié doit veiller à ce que ses convictions et activités politiques ne causent pas un trouble manifeste dans l’entreprise ni ne le conduisent à commettre des fautes professionnelles.

Il a ainsi été jugé, par exemple, qu’un salarié qui décide de s’absenter pour distribuer des tracts électoraux s’expose à des sanctions disciplinaires (Cour d’appel de Paris, 5 décembre 2013, n° 12-00973).

De même, un salarié travaillant dans un établissement pour personnes âgées qui, pendant ses heures de travail, fait du prosélytisme politique actif auprès des résidents, psychologiquement fragiles, et se fait remettre un chèque destiné à une association finançant la campagne électorale d’un homme politique commet une faute grave justifiant son licenciement (Cour d’appel de Toulouse, 4 mars 2011, n° 09-6144).

Autre exemple, la Cour d’appel de Versailles a estimé que si un salarié utilise les ressources de l’entreprise pour ses activités politiques personnelles, par exemple en affranchissant des invitations pour une campagne municipale aux frais de l’employeur, cela entraine son licenciement pour faute grave (Cour d’appel de Versailles, 14 mars 2012, n° 10-05816), notamment en raison du risque de poursuites pénales pour financement illégal de campagne électorale.

Cependant, lorsque les faits se déroulent en dehors du temps et du lieu de travail, dans le cadre de la vie personnelle du salarié, l’employeur ne peut se placer sur le terrain de la sanction disciplinaire (Cass. Soc., 23 juin 2009, n°07-45.256).

Ainsi, remettre à un collègue le programme de son parti politique à la sortie d’un salon professionnel auxquels tous deux participent n’est pas une faute. La Cour de cassation considère que, dans ce cas, le salarié n’a pas manqué à ses obligations contractuelles puisque ces faits relèvent de sa vie personnelle (Cass. Soc., 29 mai 2024, n° 22-14.779).

Néanmoins, l’employeur pourrait envisager un licenciement si cet acte génère un trouble objectif pour l’entreprise, ce qui pourrait être le cas si la distribution de ce programme politique engendrait des dissensions entre collègues, affectant leur capacité à travailler ensemble, l’employeur aurait alors un motif valable.

 

Notre avis : La frontière entre vie personnelle et vie professionnelle n’est pas simple à dessiner. Notre équipe peut vous assister dans l’analyse de la situation qui est primordiale avant toute décision.

 

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